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La presse post-virus face à son avenir
Par Philippe Amez-Droz, chargé de cours au Medialab, Université de Genève
Si, à l’instar du président Macron en France lors de son allocution du 13 avril, de nombreux responsables politiques saluent l’importance des médias et des journalistes en cette période de confinement et d’interrogations sur l’avenir, force est de constater que le Conseil fédéral n’a pas répondu aux attentes de l’industrie de la presse écrite en refusant de débloquer 80millions de francs d’aide, essentiellement indirecte.
Cette (in)décision met en exergue un fait observé depuis des décennies dans l’ensemble des pays industrialisés avec la disruption numérique: l’érosion lente mais continue des dépenses publicitaires dans les médias dits traditionnels. Elles se sont élevées en Suisse en 2019 à 7,3milliards dont 1,5milliard de francs pour l’ensemble de la catégorie Presse contre 1,7milliard en 2018, soit un recul de 10%. Mais c’est bien le segment de la presse d’information quotidienne, dont les audiences numériques ont bondi avec la crise du coronavirus, qui subit l’impact le plus fort de la fuite des annonceurs vers les sites spécialisés et les réseaux sociaux.
En 2018, la presse d’information quotidienne subissait un recul de près de 12% de ses recettes publicitaires, totalisant quelque 610millions de francs. Les diffuseurs télévisuels (SSR et télévisions régionales), qui ont capté 766millions de francs d’espaces publicitaires, sont également confrontés à une baisse de leurs revenus.
Dans nos recherches sur la crise de la demande publicitaire, nous relevions que le modèle économique biface, basé sur le double financement lecteurs abonnés et annonceurs, était mis en péril par les changements d’usage mais aussi par le modèle de financement des moteurs de recherche et des réseaux sociaux basé sur la monétisation du trafic et des données personnelles.
L’effondrement des recettes publicitaires dans le segment de la presse d’information en raison du coronavirus, soit plus de 400millions de francs selon une projection des éditeurs, souligne aussi la difficulté à monétiser les audiences numériques et à remplacer le modèle historique de double financement que l’historien des médias Patrick Eveno qualifie de «consubstantialité originelle».
Le refus d’une aide urgente à la presse d’information, le 7 avril dernier, revient ainsi à admettre que l’autorégulation des médias reste la norme en Suisse. Rien de surprenant si l’on considère que notre pays compte encore un nombre élevé de titres en comparaison européenne. Comme il est à parier que l’effondrement des recettes publicitaires ne pourra être compensé après la sortie de crise, la solution qui se dessine est une concentration accélérée avec des disparitions de titres et des rédactions encore contraintes à des réductions de coûts.
Thierry Mauron, président de l’association romande Médias Suisses, pouvait légitimement s’inquiéter en présentant les résultats d’une enquête effectuée auprès de ses membres. Parmi les réponses obtenues, 60% des journaux imprimés affirmaient avoir perdu 50% de leurs revenus publicitaires à fin mars. Et tous les titres consultés avaient introduit le chômage partiel.
L’absence d’une aide urgente de la Confédération sera-t-elle reconsidérée par le parlement? Rien n’est moins sûr. Sombre tableau en perspective que l’après-coronavirus pour les médias helvétiques
Philippe Amez-Droz